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Sahara : La brèche du shutdown ne peut endommager la solidité de l’axe Rabat-Washington

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C’est dans un contexte de crise politique interne sans précédent aux Etats Unis que démocrates et républicains se renvoient la balle depuis près de trois semaines sur fond d’une polémique autour du financement du projet du président Donald Trump visant à construire un mur à la frontière du Mexique. Les démocrates ne veulent pas de ce mur «de la honte» et refusent de le financer alors que le chef de l’Etat tient absolument à l’ériger. C’est pour lui une question de sécurité nationale. Pour ce faire, il a besoin de quelques 5 milliards de dollars de crédits que lui refuse la majorité démocrate à la Chambre des représentants. Par mesure de rétorsion, le président a bloqué toutes les lois présentées par le camp démocrate dont le budget 2019 grâce auquel l’administration peut fonctionner. Ce qui a conduit à une paralysie presque totale de la mécanique administrative du pays, notamment au niveau fédéral. A l’aune de cette lutte intestine, la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a présenté un projet de loi de budget qui a fait réagir quelques milieux marocains, en raison d’une clause visant à dissocier les aides octroyées au Sahara de la rubrique Maroc. Aussitôt proposée, aussitôt rejetée par la Maison Blanche et le Sénat, cette disposition était mal formulée, incomplète et, surtout, inapplicable. Une petite manoeuvre avortée de quelques lobbyistes pour profiter de cette brèche du shutdown et justifier leurs honoraires. D’ailleurs, il est dit noir sur blanc dans ce texte que ses dispositions ne permettent, en aucune manière, de tirer des conclusions quelconques sur un hypothétique changement de la position américaine sur la question du Sahara ou, encore moins, sur l’état des relations entre le Maroc et les Etats-Unis.

La politique étrangère de l’administration Trump cause une tension et un stress permanents à l’ensemble des capitales de la planète. Les tweets quotidiens de Donald Trump sur la politique étrangère du pays bouleversent les codes de la diplomatie classique et n’épargnent même pas ses propres collaborateurs.

Mais le projet de la loi de finance présenté par la redoutable et influente présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, et contenant une nouvelle rubrique concernant le Sahara, a certes mis -un moment- le Maroc dans une situation d’inconfort. Mais vite remis dans son contexte, ce document est placé dans un cadre autre que celui de la nouvelle politique étrangère américaine menée par l’administration Trump.

Il s’agit en fait d’un projet de loi expédié en quelques heures et en période de fêtes, dans un contexte de blocage gouvernemental et budgétaire, ce qui constitue une des rares opportunités offertes à l’opposition en vue de soutirer des concessions du locataire de la Maison Blanche. De plus, il est désormais notoire que les considérations de politique étrangère, dans ce cas d’espèce, semblent être le dernier des soucis des deux camps politiques qui s’affrontent sur un texte destiné davantage à l’opinion publique interne. En outre, le statut actuel des programmes de l’USAID et ses incidences sur le Sahara demeurent dans le flou, sans oublier que ce programme lui-même est paralysé par les effets du Shutdown, donc en stand-by.

Il n’est pas à écarter que les adversaires du Maroc auraient bien aimé voir Rabat pris dans les filets d’une guerre bipartisane autour d’un projet de loi opposant démocrates et républicains. Surtout que la paralysie administrative au niveau fédéral a ouvert une brèche aux lobbyistes algériens qui ont tenté d’imposer une nouvelle sémantique diplomatique en formulant des lectures étroites et contre-lectures spécifiques aux textes législatifs américains.

Dans un environnement nord-africain fragilisé, de Nouakchott au Caire, en passant par Alger, Tunis, Bengazi et Tripoli, seul le Maroc est à même de tenir un rôle de partenaire fiable et solide en vue de relever les défis du monde contemporain. Il n’est donc pas dans l’intérêt des Etats-Unis de voir un des piliers sûrs de la région déstabilisé ou affaibli en menaçant son intégrité territoriale. Sachant que l’Algérie est très affaiblie aujourd’hui, tant sur le plan politique qu’institutionnel, avec des manœuvres géopolitiques hasardeuses, une importante dissension au sein de l’armée par un affaiblissement sans précédent de l’homme fort du pays, le général Gaïd Salah.

Conscient de ces dangers géostratégiques, le conseiller américain à la Sécurité nationale, John Bolton, a mis en garde contre le maintien du statu quo dans le Sahara et qu’il était urgent de trouver une issue à cette crise régionale. Cette position des Etats-Unis, exprimée par un de ses faucons, met la pression sur l’ensemble des acteurs du dossier et notamment sur l’Algérie, devenue ipso facto partie prenante, et tenue d’assumer ses responsabilités devant la communauté internationale et cesser une fois pour toutes de constituer une pierre d’achoppement à une solution définitive, juste et durable à un conflit artificiel qui s’éternise et qui menace la sécurité de toute la région.

Si le but de la manœuvre au sein du Congrès américain est de créer un effet de levier sur les négociations entre démocrates et républicains sur un sujet relevant de la politique intérieure des Etats-Unis, le projet de loi en question évoque en revanche le royaume, à plusieurs reprises, en tant que partenaire en ce qui concerne les accords de libre-échange et au sujet de la coopération militaire entre les deux pays, alors qu’à aucun moment l’Algérie n’est mentionnée.

Et si la politique américaine est connue pour être basée sur le pragmatisme, l’intérêt stratégique de Washington vis-à-vis de l’Afrique du nord est fondé sur un soutien bipartisan pérenne à l’initiative marocaine d’autonomie comme solution crédible et réaliste dans la recherche d’un règlement négocié au différend sur le Sahara. D’ailleurs, le texte dont il est question stipule sans ambages, et on ne peut plus clairement, qu’aucune de ses dispositions «ne doit être interprétée comme une modification de la politique Américaine pour une solution pacifique, durable et mutuellement acceptable pour le Sahara». Il y va à notre avis de la sécurité nationale des Etats-Unis.

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