Aujourd’hui: 8 juin 2023
Ahmed Charai a été l’un des premiers analystes à alerter sur la gravité de l’escalade armée entre palestiniens et israéliens et à noter la politique de retrait de Joe Biden dans sa gestion du conflit israélo-palestinien, et ce dès les premiers signes avant- coureurs de la crise qui enflamme aujourd’hui la région.
C’est dans un éditorial paru sur The Jerusalem Post et d’un «paper analysis» publié sur The National Interest le 13 mai dernier, que l’analyste a plaidé pour l’urgence d’un rôle plus activiste de Joe Biden et de son administration pour mettre fin aux affrontements meurtriers et pour préserver les accords de paix signés par son prédécesseur, ainsi que la réconciliation entre Tel-Aviv et les capitales arabes, avancée remarquable et décisive pour une coexistence pacifique entre palestiniens et israéliens.
«Le monde regarde avec détresse la souffrance des Palestiniens et des Israéliens victimes d’une autre série de conflits qui, selon toute vraisemblance, changera peu mais nuira à beaucoup» a écrit M. Charai.
«Cette fois-ci, l’affrontement est plus laid et peut s’avérer plus meurtrier que n’importe quelle conflagration précédente entre l’État hébreux et les factions armées palestiniennes», prédisait l’analyste.
As in every round of Israeli-Palestinian conflict, the combat between the two parties is transmitted and amplified across the region. https://t.co/cz0q0IsmmE
— National Interest (@TheNatlInterest) May 16, 2021
Dans des déclarations publiques, le président américain, son secrétaire d’État Antony Blinken ainsi que son ministre de défense ont répété avec force la formule américaine standard concernant le droit d’Israël à la légitime défense face aux tirs de roquettes palestiniennes.
Tout en se déclarant préoccupé par le nombre croissant de Palestiniens tués dans les frappes aériennes israéliennes, ils ont établi une «distinction claire et absolue» entre «une organisation terroriste ciblant des civils et Israël ciblant les terroristes».
Joe Biden n’a vu aucune «réaction excessive significative» dans la réponse israélienne à la pluie de missiles du Hamas, un jugement qui pourrait être compris comme un feu vert implicite pour que l’opération se poursuive, malgré les appels au calme de la communauté internationale.
Par ces déclarations ainsi que par trois vétos en une semaine contre un texte du Conseil de sécurité condamnant l’Etat hébreux, Washington donne à Israël une «carte blanche» pour répondre aux attaques des factions armées palestiniennes jusqu’au moment où il sera jugé qu’Israël aurait réussi de détruire l’infrastructure militaire du Hamas.
Mais en même temps, la nouvelle administration américaine indique clairement que ses priorités diplomatiques se situaient ailleurs. Elle continue d’imposer une approche minimaliste discrète, naviguant dans un cimetière d’initiatives de paix qu’elle a dirigée, essayant de faire le tout contraire de l’administration Trump.
Joe Biden et son administration ont utilisé jusqu’à aujourd’hui un ton bienveillant, appelant à la désescalade de la violence et à la nécessité pour les Israéliens et les Palestiniens «d’être en mesure de vivre en sécurité» et de «jouir dans la même mesure de la liberté, de la sécurité, de la prospérité et de la démocratie», souligne M Charaï.
Toutefois, estime l’éditorialiste, l’administration Biden gagnerait à s’investir davantage pour mettre fin à cette vague d’escalade, la plus intense depuis sept ans.
Reconnaissant que les priorités de l’administration américaine en matière de politique étrangère se trouvent ailleurs, Ahmed Charaï considère qu’une posture plus «militante» pourrait commencer par «une série de petits pas qui signaleraient une volonté d’impliquer les parties locales» à savoir :
1. | L’administration américaine devrait agir rapidement pour pourvoir le poste vacant d’ambassadeur américain à Jérusalem; «un tel déménagement ne coûte rien d’autre que des cables diplomatiques», précise notre analyste. |
2. | Biden qui avait tardé à parler avec Mahmoud Abbas, devrait donner une plus forte influence internationale au président palestinien. Un tel coup de pouce est indispensable pour que le dirigeant modéré ne soit pas éclipsé par les extrémistes du Hamas. «Même si l’éclat de l’Autorité palestinienne s’est estompé ces dernières années, elle reste néanmoins le représentant internationalement reconnu du peuple palestinien. Qui de surcroit affirme toujours l’engagement en faveur d’une solution à deux États». |
3. | Une pression ferme de l’administration américaine pour empêcher une escalade majeure à Gaza pourrait servir le double objectif de réaffirmer le leadership américain dans la région et de sauvegarder une nouvelle tête de pont pour la coexistence arabo-israélienne. |
Un engagement volontariste de Joe Biden servira un objectif immédiat et urgent, affirme M. Charaï. Car une fois un état de calme serait rétabli, une nouvelle initiative multilatérale pour relancer les efforts de paix israélo-palestiniens s’impose. Le président américain devrait prendre les devants et chercher à mobiliser les parties prenantes à même d’assurer des résultats fructueux. Lesquelles parties prenantes devraient être constituées «des Émirats arabes unis, du Bahreïn, du Maroc, de la Jordanie, de l’Égypte et de l’Union européenne».
Avec le déplacement de la politique étrangère américaine vers la Chine, la mise en veille des «Accords d’Abraham» et la baisse considérable de la pression de la communauté internationale sur l’Iran, le régime des mollahs a profité de l’impasse électorale israélienne et des manœuvres de l’extrême droite du pays pour déplacer la guerre qui fait rage entre Tel-Aviv et Téhéran depuis l’assassinat de Qassem Soleimani, numéro 2 du régime, au cœur des territoires palestiniens.
Dans une interview diffusée sur la chaine de télévision irakienne Al-Ahd TV en date du 7 mai 2021, un haut responsable du Jihad Islamique Palestinien, Ramez Al-Halabi, a déclaré que les roquettes utilisées par la faction pour cibler Tel Aviv portent la signature de l’Iran et de Quassem Soleimani, commandant de la Force Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) tué en janvier 2020 lors d’une frappe aérienne américaine à Bagdad.
Il a affirmé que les membres des factions étaient formés par le CGRI et que l’argent iranien était utilisé pour acheter des armes pour les factions armées à Gaza et au Liban. Al-Halabi a ajouté que chaque maison de Gaza a le portrait de Soleimani et que «ce sont eux [l’Iran] qui nous soutiennent avec des armes, de l’argent et de la nourriture».
L’Iran fournit nos missiles, armes, fonds et nourriture, nos hommes armés «ont été formés par nos frères dans le GRI»; Sans l’aide de l’Iran, nous ne serions pas en mesure de tirer des roquettes sur Tel Aviv. Qassem Soleimani a personnellement supervisé le transfert de roquettes vers Gaza.
Entre l’axe Jérusalem et Beyrouth, l’axe Jérusalem et Bagdad, l’axe Jérusalem et Damas, l’axe Jérusalem et Sanaa, l’axe entre Jérusalem Téhéran, est l’axe victorieux.
Ramez Al-Halabi Haut responsable du Jihad Islamique palestinien
Dans une interview du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, en date du 27 décembre 2020, ce dernier a révélé que les avions israéliens avaient bombardé des usines d’armes au Soudan, car ils disposaient d’entrepôts d’armes, de munitions et de missiles qui seront envoyés plus tard, par des moyens divers, dans la bande de Gaza.»
Dans une autre déclaration cette fois-ci de Mahmoud Al-Zahar, en date du 28 décembre 2020, le haut responsable du Hamas a remercié l’Iran sur la fourniture du missile antichar russe le Kornet. Al-Zahar a affirmé que ce missile est devenu nécessaire à la lutte contre l’Etat d’occupation car il lui sera difficile de s’approcher des frontières de Gaza.
Aujourd’hui, il y a donc plus aucun doute sur les responsabilités de Téhéran dans l’approvisionnement continu en matériel de guerre en faveur à la fois des milices armée palestiniens et également au profit des rebelles chiites houthis du Yémen. D’ailleurs, la stratégie des «attaques en essaim» avec des batteries mobiles activées simultanément afin d’atteindre la saturation des batteries israéliennes du système d’interception «Iron Dome» est la même qui a été utilisée contre l’Arabie Saoudite et son système de défense antiaérien Patriot, endommageant entre autres une installation stratégique d’Aramco.
Le Hamas a réussi à lancer plus de 3000 missiles et roquettes en une semaine atteignant des fois une portée de plus de 250 km. Une artillerie en quantité et en qualité incroyables à travers laquelle Téhéran a réussi à mener une guerre par procuration au cœur d’Israël.
«Comme dans chaque cycle de conflit israélo-palestinien, le combat entre les deux parties est transmis et amplifié à travers la région, alimentant encore plus d’animosité envers les Israéliens dans le monde arabe», indique Ahmed Charaï.
L’Iran profite de cette dynamique négative et de cet environnement empoisonné. Le recours à la violence aveugle est assimilé à du courage, donnant l’illusion aux yeux de nombreux Palestiniens, que le Hamas était la seule force disposée à «tenir tête à Israël» et à «défendre al-Aqsa» contre l’empiétement israélien.
Ce machiavélisme iranien isole jour après jour les Palestiniens et autres Arabes sympathisants de la paix et de la réconciliation. Ils sont confrontés à la marginalisation ou sont qualifiés de traîtres. Cela s’étend même à ceux, comme le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, avec de longs antécédents d’opposition à la politique israélienne, s’indigne M. Charaï.
Et d’ajouter, une confrontation prolongée menacerait sûrement la stabilité sociale en Cisjordanie, qui jusqu’à présent a été une oasis de calme.
Hamas is to blame for this current round of violence https://t.co/b7ziASG6Jf
— Giulio Terzi (@GiulioTerzi) May 14, 2021
Quatre élections en moins de deux ans et toujours pas de majorité claire pouvant constituer le gouvernement israélien. Après l’échec de Benjamin Netanyahu à former une coalition, le président israélien Reuven Rivlin a donné, mercredi 5 mai jusqu’au 2 juin, mandat au chef de l’opposition, Yaïr Lapid, de former un gouvernement.
Quelques jours après, Itamar Ben-Gvir, chef du parti extrémiste Otzma Yehudit (Force juive), allié de Netanyahu, va mettre un coup de pression en participant aux affrontements à Cheikh Jarrah et autour du mont du Temple. Deux évènements déclencheurs de l’actuel escalade meurtrière.
Ces évènements vont certainement peser sur la gauche qui a suspendu ses négociations pour former un gouvernement. Son échec donnerait à Netanyahu, en procès pour corruption, une nouvelle chance à travers une cinquième élection. Mais à quel prix. Le Hamas financé par le Qatar et armé par l’Iran se positionne en défenseur de Gaza avec 2 millions de Palestiniens pris en otage. L’organisation islamo-nationaliste réussi à fédérer une large frange des musulmans de par le monde ainsi que le mouvement palestinien en mal de leadership et sans horizon politique, en prétendant incarner la défense de Jérusalem et plus particulièrement de la mosquée al-Aqsa.
«Il est à peine besoin de dire que la paralysie politique en Israël au cours des deux dernières années a largement contribué à cette impasse» écrit Ahmed Charai dans son analyse parue sur The National Interest.
«La plupart des dirigeants du pays s’attachent étroitement à survivre aux épreuves politiques de l’époque, ne laissant aucune place à l’empathie stratégique à long terme sans laquelle Israël ne peut établir des relations amicales et pacifiques avec ses voisins palestiniens. Pour le bien de l’avenir de leur pays, ils doivent travailler pour transcender ces deux épreuves – et leurs propres ego conflictuels – pour parvenir à un cessez-le-feu.» conclut-il.
M. Ahmed Charai est éditorialiste et éditeur de presse, Administrateur de Plusieurs Think tank à Washington – Membre du Conseil d’Administration du “Center for Strategic and International Studies” à Washington, – – Membre du Directoire de l’ONG “Search for Common Ground” à Washington, – Membre du Conseil du Directoire de ” The Atlantic Council of United States” à Washington – Membre du Conseil Editorial Consultatif de “The National Interest’s Magazine” à Washington. – Membre du Conseil d’Administration du “The Foreign Policy Research Institute” à Philadelphia– Membre du Conseil d’Administration du International Crisis Group. Mr Charai est aussi membre du conseil Consultatif de Gatestone Institute à New York. Mr Charai, s’exprime souvent dans de grands journaux et médias américains dont le Wall Street Journal, New York Times, Le Monde, Fox News, National Interest Magazine, Huffington Post.
Intelligence analyst. Reputation and influence Strategist
20 années d’expérience professionnelle au Maroc / Spécialisé dans l’accompagnement des organisations dans la mise en place de stratégies de communication d’influence.