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La Boussole stratégique du Maroc : un besoin pressant de vulgarisation

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Comment les Marocains ne se sentiraient-ils pas déboussolés, tant les crises économiques, politiques et diplomatiques se succèdent sans que d’aucuns daignent les éclairer ?

Même Nasser Bourita, leur ministre préféré, rassure de moins en moins. Depuis la curieuse affaire des diplomates de notre ambassade en Colombie, les «emmerdes» de notre diplomatie volent en escadrille.

Aziz Akhannouch, le principal protagoniste de l’exécutif, de même que nos élites politiques et intellectuelles, se sont enfermés dans un mutisme sidérant. Nos concitoyens, en perte de repères et à la merci de la désinformation, de l’opportunisme de Abdelilah Benkirane et de spéculations à tout va, sont rattrapés par l’angoisse et le doute.

Pour combler ce déficit abyssal de communication, Abdellatif Hammouchi se voit obliger de distiller ses apparitions tout en maintenant une communication fluide des entités dont il a la responsabilité.

Fouzi Lekjaa accumule quant à lui les succès dans le football, fédérant autour du jeu une véritable communion entre les différentes couches de la société. Même la grande muette est plus audible que le gouvernement, au vu des activités soutenues des Forces Armées Royales, aussi bien au niveau national qu’international. 

Deux autres instituions sortent du lot : Bank Al Maghrib et le HCP.  Deux îlots de l’administration dont les responsables n’hésitent pas à privilégier la franchise et la transparence sur les réalités économiques et sociales du pays.

Ne nous voilons plus la face, Aziz Akhannouch est tétanisé par la gravité du moment et le poids de la responsabilité. Ses imprudences, ses fragilités et ses incapacités occultent malheureusement toutes les réussites du Royaume. Pourtant, le Maroc est l’un des rares pays africains et arabes à résister à cette grave crise de l’ordre mondial.

Nous vivons une période charnière qui nous impose des choix stratégiques en rupture avec la neutralité historique du Maroc. Lesquels choix peuvent être mal compris ou pas assimilés du tout par bon nombre de nos concitoyens. 

En ces temps de turbulence, nous avons besoin, plus que jamais, de fédérer toutes les forces vives de la nation. Peut-on alors commencer par donner de la visibilité aux Marocains en leur expliquant avec pédagogie et sérénité la Boussole stratégique de leur pays ?

Mais où va le monde ? Où va notre pays ? Avons-nous encore les moyens, voire la liberté de décider de notre avenir ? Ces interrogations banales mais persistantes que chacun de nous se pose devant le flux de mauvaises nouvelles qui nous inondent, ne sont pas propre à nous les marocains. Américains, australiens, européens ou asiatiques sont tous sous le choc du chaos du monde d’aujourd’hui, de l’incertitude et de l’impermanence. L’essoufflement des dynamiques de la mondialisation heureuse (1985-2007) a laissé place au désordre, à l’incomplétude, à la complexité, et aujourd’hui à la guerre.

Pourtant, le ressenti de ce phénomène planétaire de perte de repères est plus prononcé dans un pays comme le notre. 

D’une part, le Royaume a été particulièrement visible durant cette décennie, résistant et déjouant moult complots plus machiavéliques les uns que les autres. Et quand on est visible, on est visé, principalement par les ratés, les hargneux, les jaloux et les baveux.

D’autre part, les manoeuvres externes ont participé à la dégradation des paysages politique et médiatique. Cela a donné lieu a une surenchère verbale et éditoriale poussant à la radicalisation des positions et l’absence de débat. Un nivellement vers le bas initié par les islamistes de Benkirane et accéléré par les oligarques d’Akhannouch.

La monarchie, clé de voûte de l’état marocain et de son unité sociale

Nous ne pouvons pas comprendre la situation actuelle du Maroc, aussi bien sur le plan de la gouvernance, de la politique ou de l’économie si nous ne tenons pas compte deux «inputs» fondamentaux.

Le premier «input» est le temps. La dictature de l’urgence qui caractérise la nouvelle ère digitale, a complexifié l’action des gouvernements et a rendu la monarchie presque intemporelle. Si le temps de l’information se compte en minutes, du gouvernement en mois, celui de la monarchie se compte en siècles.

La fragilité du gouvernement Aziz Akhannouch aussi bien sur le plan politique que sur le plan de la communication lui a été fatale. L’oligarque et sa cour sont tombés dans le piège de la course à l’information et à l’émotion engagée par les médias. Son action s’apparente plus à la gesticulation, au moment où la gestion d’un état exige du temps et des institutions pour permettre de dégager un horizon porteur de sens. Akhannouch s’est préparé pour gagner les élections et occire les islamistes, nous lui sommes redevables. Toutefois, il ne s’est pas préparé pour gouverner.

La discordance des temps s’est accrue entre les orientations stratégiques de la monarchie, leur lente transformation en actions par l’exécutif et leur compréhension des médias puis leur assimilation par les citoyens.

Le second input est à trouver dans le discours vérité, foudroyant et sans précédant du Roi Mohammed VI en date du 20 avril 2016.

Lequel discours que le souverain a prononcé devant le sommet Maroc-Pays du Golfe à Ryad, le jour même de la visite officielle en Arabie saoudite, de celui qui a pensé le printemps arabe, le président américain Barack Obama. 

Ce jour là le souverain a dévoilé en toute transparence la nouvelle doctrine diplomatique du Royaume, que les médias français ont qualifié de «virage anti-occidental».

Nous invitons nos lecteurs à relire avec le recul qui est le leur, ces passages qui resteront gravés dans l’histoire des relations internationales :

«La situation est grave, surtout au regard de la confusion patente dans les prises de position et du double langage dans l’expression de l’amitié et de l’alliance, parallèlement aux tentatives de coups de poignard dans le dos. Que veulent-ils de nous?

Nous faisons face à des complots visant à porter atteinte à notre sécurité collective. Ceci est clair et n’a pas besoin d’analyse. Ils en veulent à ce qui reste de nos pays, qui ont pu préserver leur sécurité, leur stabilité et la pérennité de leurs régimes politiques.

J’entends par là, les Etats du Golfe arabe, le Maroc et la Jordanie, qui constituent un havre de paix et de sécurité pour leurs citoyens, et un élément de stabilité dans leur environnement.»

Le souverain nous avait donc alerté, ainsi que le communauté internationale sur les dangers qui menaçaient le Maroc et les complots que fomentaient, hélas, nos alliés historiques. 

«Les plans d’agression attentatoires à notre stabilité se poursuivent toujours et ne cesseront pas. En effet, après avoir morcelé et détruit nombre de pays du Machreq Arabe, les voilà qui s’en prennent aujourd’hui à son flanc occidental. Le dernier en date concerne les manœuvres orchestrées contre l’intégrité territoriale de votre deuxième pays, le Maroc.

Rien de nouveau, puisque les adversaires du Maroc déploient tous les moyens, directs et indirects, dans leurs menées flagrantes.» 

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Sept années plus tard, les médias et l’opinion publique s’interrogent encore sur les attaques et les coups de poignard dans le dos que subit le Maroc.

Les phrases prononcées par le Roi Mohammed VI auraient dû nous éviter les polémiques et les faux débats. La politique étrangère offensive menée par le royaume, matérialisée par les positions fermes envers l’Europe, notamment l’Allemagne, l’Espagne puis la France, n’est pas une hérésie comme tentent d’expliquer les Youtubeurs. Mais bel et bien une mise en oeuvre d’une stratégie pensée et assumée.

Un autre indice sur la détermination, la clairvoyance et l’assurance de la politique étrangère du Roi Mohammed VI exprimées dans le discours de Riyad est sa prédiction de cet évènement majeur annoncé ce week-end, à savoir l’alliance de l’Arabie Saoudite, l’Iran et la Chine.

«Il y a cependant de nouvelles alliances qui risquent de conduire à des divisions et à une redistribution des cartes dans la région. Ce sont, en réalité, des tentatives visant à susciter la discorde et à créer un nouveau désordre n’épargnant aucun pays, avec des retombées dangereuses sur la région, voire sur l’état du monde», avait alerté Mohammed VI.

On devrait également ne pas s’étonner de la mobilisation sécuritaire du Royaume, aussi bien sur le plan sur le plan des renseignements que militaire. Un réflexe naturel de survie contre l’augmentation des menaces d’agression externes.

D’ailleurs, même si Obama a quitté le pouvoir fin 2016, il a laissé ses bûcherons disséminés un peu partout pour continuer le travail de sabotage. Des vagues de déstabilisations se sont succédées. Avec un paysage politique fragilisé par les islamistes de Benkirane, l’allégeance historique de certains protégé de Paris, la lenteur de l’assimilation par la société des nouveaux choix stratégiques, le tour de vis sécuritaire s’est imposé comme l’option ultime pour préserver la paix et l’intégrité territoriale du Royaume.

Une gouvernance de guerre

Contrecarrer le mouvement des plaques tectoniques de la grande reconfiguration géopolitique mondiale n’est pas une chose aisée. La lutte est dure, très dure même. Pour preuve, nous assistons aujourd’hui ébahis à l’effritement de l’Europe en dépit des moyens colossaux dont dispose le vieux continent.

Au Maroc, le Roi Mohammed VI s’est exposé personnellement non sans encaisser les coups au prix de sa santé. Parallèlement, la gouvernance a du s’adapter au contexte de cette guerre «presque non dite». Abdellatif Hammouchi s’est hissé du rang de patron de la sureté nationale, des renseignements et de la lutte antiterroriste à celui du véritable fer de lance de la diplomatie sécuritaire du Royaume et à l’interlocuteur privilégié des capitales occidentales.

C’est en juin 2022, que s’est manifesté cette nouvelle envergure de l’aura de M. Hammouchi. Après un voyage remarqué au Qatar, Il reçoit dans un premier temps, le Directeur général de la police fédérale d’Allemagne, Dieter Romann, avant de s’envoler en Virginie et à Washington pour rencontrer les chefs de la sécurité nationale américaine, notamment une certaine Avril Haines, la première femme patronne des services de renseignements (CIA et NSA) de l’histoire des États-Unis. Elle est considéré comme l’espionne la plus puissante du monde.

Seulement quatre mois plus tard, Avril Haines s’est rendue elle même au Maroc où elle a été reçue par M. Hammouchi.

M. Hammouchi joue également un rôle symbolique important, en se rendant visible auprès de l’opinion publique, notamment dans les grands événements sportifs. Des apparitions qui rassurent les marocains, surtout avec un Aziz Akhannouch et des politiques inaudibles et impopulaires.

Les Forces Armées Royales se sont modernisées et renforcées. Les manœuvres «African Lion» largement médiatisées par les américains ont été la cible de tentatives de sabotage, par les algériens et autres pays européens. Une publicité qui a davantage servie à la grande muette qui s’est ouverte progressivement aux médias. Le très discret forum FAR Maroc, s’est transformé au fil du temps en une véritable plateforme de communication avec le monde surtout sur son compte twitter.

Le ministre de l’intérieur, extrêmement sollicité notamment durant la pandémie du Covid assure là ou les oligarques d’Akhannouch sont complètement absents. C’est l’unique département du gouvernement qui pense «social». 

En effet, les équipes de Abdelouafi Laftit, les plus proches des citoyens, sont les premiers à penser à la sécurisation de l’approvisionnement des marchés, au déploiement des stratégies de lutte contre le grand froid, contre les risques de délestage et de coupures d’eau courante,… etc.

Si cette reconfiguration de gouvernance de la sécurité nationale a prouvé son efficacité et sa performance, la gouvernance économique est sujette à de grandes interrogations.

Sur le plan macroéconomique, la sagesse et l’expérience de Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib couplées à l’agilité de Fouzi Lekjaa nous ont sauvé de l’incompétence d’un Boussaid qui voulait nous précipiter dans la libéralisation de la monnaie, et la fragilité d’inexpérience d’une Fettah.

Sur tout le reste c’est le flou total. Aziz Akhannouch, acteur principale de l’énergie a accentué le manque de visibilité de la politique énergétique de l’Etat. Puis sur un autre registre ayant un patronat amorphe sous sa coupe, il s’est empêtré dans une guerre avec l’Intérieur et les ministres de son alliance gouvernementale pour mettre la main sur l’investissement.

Notons que la gouvernance de l’investissement public a été complètement chamboulée. En effet, Mohcine Jazouli en tant que Ministre délégué chargé de l’Investissement, de la Convergence et de l’Evaluation des politiques publiques, n’a pas réussi à avoir les mains libres. Car il doit composé avec des poids lourds de l’appareil de l’Etat, entre autres :

  1. Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du Commerce,
  2. Abdellatif Zaghnoun, DG de l’Agence Nationale de Gestion Stratégique des Participations de l’Etat, et de suivi des performances des établissements et entreprises publics,
  3. Khalid Safir, DG de la CDG,
  4. Mohamed Benchaâboun, Directeur Général du Fonds Mohammed VI.

Par ailleurs, le système financier tourne au ralenti. Le sort de Bank Of Africa ( EX BMCE) est toujours en suspens. L’altercation entre Othman Benjelloun et de Zouheir Bensaid démissionnaire amplifie la fragilité du groupe. 

L’arrivée de Holmarcom sur le bancaire et les difficultés du sud-africain Sanlam à maintenir le trend de Saham brouillent la lecture du marché.

Boussole stratégique

Dans cette lecture perfectible de la situation de la notre pays, nous pouvons être certains de l’existence d’une logique géostratégique qui a conduit à l’élaboration d’une Boussole stratégique du Royaume dont on découvre au fur et à mesure les contours.

La crise de l’ordre mondial et la recrudescence des menaces qui pèsent contre le Maroc sont bien réelles tout comme le retour aux confrontations militaires interétatiques entre grandes puissances.

Le Maroc n’aurait pas pu garder son intégrité territoriale et préserver sa paix sociale sans les efforts des femmes et des hommes visant à rendre cette boussole opérationnelle. 

Certaines lignes directrices importantes sont plus avancées que d’autres. La discordance des temps entre la vision, l’exécution et la médiatisation d’une part et l’inadéquation de certains profils avec leurs missions en sont la cause.

Aussi bien sur des problématiques quotidiennes liées à la cherté de la vie, qui n’est plus une perception individuelle mais collective, que sur des politiques économiques et étrangères lourdes, il est important et peut-être pressant de vulgariser davantage la Boussole stratégique du pays.

Les déclarations d’un Youtubeur comme Elmahdaouy ou d’un politicien comme Benkirane sont des symptômes de l’absence de communication de l’exécutif. Ce sont deux leaders d’opinion qui revendiquent tout le contraire d’une Boussole stratégique claire et déterminée. Le premier agit par ignorance et le second par opportunisme.

Et ils ne sont pas les seuls.

Une pléthore de voix pullulent sur les réseaux sociaux. Au fil du temps les marocains se passent le mot, deviennent de plus en plus inquiets, les acteurs économiques de plus en plus frileux et la machine administrative tourne a ralentie.

Il est dangereux de laisser croire aux marocains que ces crises sont la conséquence de changements imprévus pour esquiver ou faire face à quelque événement subit.

Les imprudences, les incapacités, voire les complaisances du gouvernement Akhannouch doivent laisser place à la determination, l’assurance et la clairvoyance d’une monarchie bien ancrée dans la profondeur historique et d’un Royaume millénaire et indépendant.

Intelligence analyst. Reputation and influence Strategist
20 années d’expérience professionnelle au Maroc / Spécialisé dans l’accompagnement des organisations dans la mise en place de stratégies de communication d’influence.

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