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La fausse bonne idée de Moncef Belkhayat

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Décidément nous vivons une drôle d’époque.

Les libéraux et les capitalistes assumés qui ont, sur plusieurs décennies, clamé l’économie de marché, le libre-échange et l’abolition des frontières commerciales, tout en diabolisant le protectionnisme, ont été subitement gagnés ces derniers temps par une drôle de fièvre, la fièvre du Trump Wall.

Le patient zéro ayant présenté des symptômes de ce syndrome chez nous au Maroc, n’est autre que l’homme d’affaires et politique, le non moins hyperactif, Moncef Belkhayat.

Les premières bouffées de chaleur transparaissaient, en 1080p HD sur les players Youtube, (notez bien Youtube) pendant que l’ancien ministre donnait sa déclaration “historique” au journaliste du site web d’information Hespress.com (lien):
“Il est urgent de réduire la prédominance des réseaux sociaux et des moteurs de recherches, Google, YouTube et Facebook. Ils cumulent scandaleusement plus de 80% du marché de la publicité au Maroc. Je lance donc, un appel au gouvernement, afin qu’il promulgue une loi qui régulera le marché de la publicité en ligne et limitera la part de ces géants à 50% de l’investissement publicitaire pour sauver la presse numérique de la faillite, et promouvoir le contenu journalistique digital marocain. Et “inchallah Arrahmane Arrahime”, dès que ce gouvernement sera constitué, le ministère de la Communication doit prendre en charge ce dossier.”

En d’autres termes, Moncef Belkhayat souhaite ériger un mur contre Facebook, Youtube et Google, to “ Make Moroccan News web sites WB Africa, Great Again !

Surréaliste n’est-ce pas !?

Cette déclaration tonitruante et empathique envers les sites web d’information en faillite, s’est faite en marge d’une rencontre cosie, avec la presse, organisée par notre patient, fébrile de voir partager des milliers de fois sur Google, Youtube, Facebook, “son nouveau rêve” africain (cette fois-ci): WB Africa (cliquer pour visiter)

WB Africa est un projet d’agence de communication qui projette de s’implanter sur plus d’une dizaines de pays du continent. Mais WB Africa, c’est d’abord et surtout un projet de machine à cash, alimentée par de l’achat d’espace publicitaire. Car M. Belkhayat, à qui l’ignore, est le numéro 2 marocain de l’achat média à travers l’agence WBmedia (Starcom) chopée en 2012 à son ennemi juré le publicitaire Karim Bennani, profitant d’un imbroglio juridique qui avait éclaté entre Starcom et le patron de MCN (cliquer pour visiter)

Personne n’est dupe, la sortie médiatique du Vice-Président de la région de Casablanca, calculée ou pas, n’avait rien d’empatique ou d’engagé (voir réactions d’anonymes plus bas). Néanmoins cette sortie a permis de révéler au grand jour, l’importance et la taille qu’ont pris les majors d’Internet sur la publicité digitale au Maroc.

Toutefois, le fait de désigner du doigt Facebook, Youtube et Google, qui sont d’abord les concurrents de WB Media, ses concurrents, comme l’axe de mal qui oeuvre à faire couler les éditeurs d’information digitale, et se proposer de défendre ces derniers en appelant, de par sa casquette politique, à faire voter une loi “antidopage” mais ne cherchant en vérité que protéger la position et le business plan de WB Africa vendu à Actif Invest, est une erreur et une maladresse de plus à accrocher sur le Wall of Shame de M. Belkhayat.

Anomalie 1: Libéralisme ou protectionnisme, il faut choisir

Quand on prône, en tant qu’acteur économique et politique ouvertement et publiquement, la libre entreprise, le libre-échange, la libre consommation et quand on est identifié dans la société comme défenseur du libéralisme économique, qui est, on le sait tous, fondé sur une faible, voire une non-intervention de l’Etat dans l’économie, un tel discours émanant de notre patient constitue une contradiction majeure et nous pousse naturellement à chercher les vraies motivations de cette communication.

Anomalie 2: Quand je déclare la guerre aux mêmes outils qui ont fait ma notoriété

Hormis le foot et les petites histoires, il faut reconnaître que l’ancien ministre a été pionnier et a su profiter de la puissance des réseaux sociaux pour accroître sa notoriété. Ces mêmes outils qui constitueraient, aujourd’hui, un “réel danger” quant à la survie de la presse digitale, ont été hier encore, et plus précisément durant les élections régionales de 2015, très décisifs pour l’issue des résultats obtenus par le candidat.

Moncef Belkhayat, Monsieur Facebook, aurait-il perdu la foi dans son fonds de commerce et aurait-il perdu la bataille contre les haters?

Anomalie 3: Chiffre d’affaires contre contenu, une histoire de mindset vendeur vs marketeur

Quand un vendeur cherche à placer un produit, à un prix donné et à réaliser ses objectifs, puis se voit coincer entre une qualité médiocre de son produit/service d’une part et des concurrents à fonds illimités d’autre part, il baisse sa marge, revoit son d’ambition puis crie au loup. La perspective de voir fondre comme neige sa commission le hante nuit et jour.

Tandis que le marketeur, analysera le marché, pensera marque, proposera du Brand Content, cherchera de la créativité et de l’émotion et réfléchira aux forces et faiblesses, tentera des alliances et transformera le business.

 

Anomalie 4: Ne pas apprendre des expériences passées

L’épisode de l’interdiction de la VoIP par l’ANRT, et la pression interne et externe immense qui a fait briser, après plusieurs mois de résistance, le mur de fer érigé contre WhatsApp et Skype entre autres, aurait dû faire réfléchir notre patient zéro plus d’une fois. Car les enjeux de la VoIP dépassaient des millions de fois les enjeux de WB Africa. Il y était de la survie de nos opérateurs Telecom et de la sécurité nationale.

Anomalie 5: Faire fi de son environnement

En voulant faire plaisir au sites web d’information, l’ancien ministre de la Jeunesse a oublié une composante essentielle de l’écosystème : les auto-entrepreneurs du digital et ils sont très, très, très nombreux. Ces auto-entrepreneurs, un statut qui représente by the way une fierté du Parti RNI et qui a figuré d’ailleurs dans les grandes réalisations du parti politique dont est issu M. Belkhayat, sont des petites fourmis qui produisent tant bien que mal du contenu, des logiciels, du graphisme à l’ensemble de l’économie numérique, passant des sites web d’information, des agences de communication (comme WB Arica) aux grandes entreprises publiques et privées.
Ces petits acteurs qui subissent l’inefficience du marché, l’étroitesse exponentielles des budgets, et les affres des délais de paiement se sont vu directement visés par le Belkhayat Wall. Des réactions en chaîne ont été enregistrées sur les réseaux obligeant notre patient zéro à s’expliquer…trop tard.






Hey #KhoyaMoncef leave the kids alone… All in all it was just a brick in the wall.

Stratégie, générosité, partage et créativité

Oui je rejoins M. Belkhayat sur un point, résister à l’hégémonie des GAFA relève effectivement des prérogatives de l’Etat et du législateur. Mais c’est également de la responsabilité des acteurs économiques, culturels, des big players de l’écosystème numérique, des régions, des villes et des métropoles. Si vous êtes arrivé jusqu’ici, chers lecteurs du www.le1.ma, supportez 30s supplémentaires mes convictions à notre sujet:

  • Prendre le problème dans son ensemble et pas que du simple côté du cash en devise des publicités qui nous file quotidiennement entre mains.
  • Contrairement à l’idée de M. Belkhayat, l’initiative ne doit pas émaner du ministère de la Communication mais plutôt du Département de l‘Economie numérique géré d’ailleurs par le RNI. Qui à l’instar de la stratégie d’accélération industrielle, devrait nous proposer une stratégie de développement numérique et le renforcement de l’écosystème digital.
  • Créer des pools de pression, des advisory boards nationaux pour structurer la communication et les négociations avec les GAFA à l’instar de ce que font les groupe de pression sous d’autres cieux.
  • Encourager à la création nos propres plateformes technologiques nationales: datacenters, moteurs de recherche, partage de vidéo, réseaux sociaux…
  • Application stricte de la loi quant à la protection de la liberté intellectuelle, la lutte contre la contrefaçon, la piraterie et les autres atteintes aux droits intellectuels.
  • Démultiplier les incubateurs de créativité et de contenu digitaux afin de stimuler et valoriser la créativité, et encourager les initiatives nationales
  • Proposer et lobbyer au niveau de l’Union Africaine pour une stratégie continentale numérique destinée à ses 1,216 milliard d’habitants.

#LbaydaMonAmour vs #Wecasablanca

La générosité, la fraîcheur de ce travail est un cas d’école.

Bravo à l’agence de communication Bonzai.  #LbaydaMonAmour !


Nawfal Laarabi

Intelligence analyst. Reputation and influence Strategist
20 années d’expérience professionnelle au Maroc / Spécialisé dans l’accompagnement des organisations dans la mise en place de stratégies de communication d’influence.

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