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Malte ou comment devenir très grand quand on est tout petit

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On dit souvent que les voyages forment la jeunesse, mais moi, après un séjour de quelques jours à Malte, je puis vous dire que les voyages ça secoue parfois des gens qui ne sont plus très jeunes comme moi. En vérité, Malte m’a donné une vraie gifle qui m’a non seulement réveillé mais m’a poussé aussi à avoir un autre regard pas très bienveillant envers mon pays et envers des pays comme le mien. Vous vous doutez bien que ce n’est pas la première fois que je voyage, ni que je vais dans un pays développé en Europe ou ailleurs, mais c’est la première fois où j’ai mis les pieds dans un État minuscule géographiquement mais bien grand historiquement, économiquement et socialement.

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Quand vous êtes à Malte,vous êtes à la fois à Rome, à Londres, à Bordeaux, à Madrid, à Vienne, à Tunis ou à Tanger. Il y a même un grand quartier qui porte le nom de… Rabat et un autre qui s’appelle, à juste titre « Mdina », exactement comme nos vieilles villes antiques

Ce voyage était à caractère professionnel puisque j’ai participé au 5ème Forum Méditerranéen du Tourisme qui se tient à Malte tous les ans.

Votre humble serviteur a été invité en tant que tout nouveau Secrétaire Général de l’AMJET, la section locale de Fijet (Fédération Internationale des Journalistes et Écrivains du Tourisme), en compagnie de mon vieil ami et cher Président, Najib Senhadji, par mon nouvel ami M. Tijani Haddad, ancien ministre du tourisme de Tunisie et actuel Président de Fijet Monde. D’ailleurs, même Najib, dont c’était la 3ème participation à ce forum, a été secoué autant que moi sinon plus par ce périple court mais tellement envoûtant.

Comme je ne pourrais pas tout vous raconter, je vais me limiter aux éléments qui m’ont le plus interpellé et le plus touché.
Tout d’abord, la rigueur et la précision dans l’organisation. Il faut d’abord que je vous donne deux chiffres-clés de ce forum : 1200 participants de 39 pays. Essayez d’imaginer la logistique nécessaire à une rencontre d’une telle envergure dont la réussite a été totale.

Les responsables du tourisme du Maroc ont brillé par leur absence

Je passe rapidement sur l’accueil à l’aéroport et sur le transport aux hôtels, et je passe directement au pot de bienvenue très cool et très convivial organisé le soir même de notre arrivée, pour permettre aux participants de se retrouver ou de faire connaissance. A cette occasion, Tony Zahra, le grand et puissant patron de la MHRA – l’Association des hôteliers et restaurateurs de Malte – a organisé une cérémonie solennelle pour remercier d’une manière très chaleureuse, très expressive et très amicale Andrew Agius Muscat, membre du bureau de MHRA et, surtout, Président de Fijet Malte, qui a été la cheville ouvrière de l’organisation de ce forum et de ceux qui l’ont précédé.

Si je vous en parle, c’est pour vous dire qu’on reconnaît un grand peuple également par sa culture de reconnaissance et de gratitude, des denrées bien rares dans nos contrées. C’est le lendemain que devaient démarrer les travaux du forum à l’Hôtel Hilton Malta, un vrai joyau tant au niveau architectural qu’au niveau des équipements et infrastructures.

Le démarrage du forum était prévu sur le programme à 9h15. Et bien, je vous assure qu’à 9H15 tapantes, Andrew était au micro pour souhaiter la bienvenue aux participants et annoncer l’ouverture officielle des travaux. Son speech n’a pas duré plus de 5 mn pour laisser place aux premières Master Classes , 12 au total, qui allaient se dérouler tout au long de la journée dans plusieurs salles de l’hôtel sur des thèmes divers et instructifs comme, par exemple, « l’efficacité énergétique des hôtels en méditerranée », « l‘état de l’hospitalité et de l’investissement dans la région méditerranéenne », « Les femmes et le leadership touristique », « L’héritage culinaire méditerranéen », « La technologie ou comment redéfinir l’avenir de l’hospitalité » et bien d’autres sujets, dont même un sur le film touristique qui, je viens de l’apprendre, dispose de son propre festival international.

Bref, nous n’avions que l’embarras du choix et notre seul problème était de savoir comment être dans une Master Class tout en étant dans une autre.

Concernant ces Master Classes, il n’y avait pas d’interruption pour déjeuner ou autre car les organisateurs avaient installé dans toutes les salles et durant toute la journée, des buffets avec de l’eau, du café, du thé et même des sandwichs et des gâteaux. On se levait en silence, on se servait tout en continuant d’écouter les interventions. Parce que les participants sont venus à ce forum pour échanger et pour apprendre et ils n’ont donc pas de temps à perdre.

Au même moment se tenait une exposition permanente avec divers stands de diverses sociétés et de nombreux pays qui exposaient ce qu’ils ont de plus nouveau ou de plus performant.

L’authenticité et la modernité ont un pays, et ce n’est forcément celui auquel vous pensez.

Et à propos de pays, les responsables du tourisme du Maroc ont brillé par leur absence. Normalement l’ONMT, notre office du tourisme devrait être là car sa principale mission est, théoriquement, de promouvoir notre pays sur le volet touristique. Et ce forum était justement une occasion unique et économique de rencontrer des professionnels et des journalistes de tous les continents de la planète et qui leur étaient offerts, comme ça, sur un plateau d’argent. 1200 participants de 39 pays, vous dis-je !

Ils auraient dû être là aussi pour s’instruire et se former, ou juste pour apprendre à copier sur de plus forts qu’eux pour faire, ou juste essayer de faire comme eux. Comble de l’ironie, il y avait un pays qu’on ne pouvait pas penser qu’il serait là et qui avait son stand avec brochures, dépliants et… dattes. Oui, vous l’avez deviné, c’est notre cher voisin et néanmoins meilleur ennemi officiel : l’Algérie. Et oui !

D’ailleurs, l’Algérie n’était pas le seul pays arabe, car il y avait aussi la Tunisie avec une délégation d’au moins 5 participants dont 3 anciens ministres et un ancien préfet. Même la Palestine avait une délégation dont un des membres a animé avec brio la Master Class sur le tourisme religieux. Et oui, ça aussi ça existe.

Le soir, nous avons été invités à un dîner offert dans un magnifique palais par Mme Marie-Louise Coleiro Preca, la Présidente de la République de Malte et qui, soit dit en passant, est devenue presque une amie. En effet, quand elle est arrivée à l’entrée de la grande salle des fêtes, elle m’a spontanément tendu la main et je lui ai tendu la mienne tout en me présentant. Dès qu’elle a appris que j’étais Marocain, elle m’a fait un grand sourire, et nous avons échangé quelques mots très agréables que je ne pourrais pas vous révéler.

Après cela, elle a tenu à me présenter une grande personnalité qui, m’a-t-elle précisé, vient aussi du Maroc. En fait, c’était Dr Abdelaziz Ben Othman Altwaijri qui n’est autre que le Directeur Général de l’Organisation Islamique pour l’Education, les Sciences et la Culture (ISESCO). En vérité, il n’est pas Marocain (Saoudien, ndlr), mais il vit au Maroc puisque le siège de l’ISESCO se trouve à Rabat.

Andrew Muscat, le maître de cérémonie, a appelé Najib Senhadji à monter sur scène pour recevoir un trophée à la mémoire de Mustafa Trai, le défunt et regretté ex-président de Fijet Maroc

Le lendemain, la séance a été ouverte par ma (presque) nouvelle amie, la Présidente de Malte. Elle est arrivée pile à l’heure prévue, devancée quelques minutes plutôt par le Roi de Ghana, celui qu’on appelle « Le roi des Ashanti » qui est venu avec toute sa très sympathique et très colorée smala.

Au-delà de son aspect quelque peu folklorique, cette présence avait un objectif que nous avons vite compris, notamment à travers le long mais important discours du roi, lu avec un excellent anglais et dans lequel il a défendu ardemment l’appartenance de son petit royaume la République Ghanéenne, et nous a montré clairement qu’il n’était pas là juste pour amuser la galerie, mais aussi pour faire la promotion du tourisme et de l’investissement dans son pays.

Après ce spectacle exotique et quelques autres numéros artistiques locaux, nous sommes de nouveau passés aux choses sérieuses avec des débats professionnels qui ont vu la participation d’éminentes personnalités et des spécialistes de plusieurs domaines, venus de plusieurs pays. Chaque débat était animé par un animateur ou une animatrice, et le temps imparti était strictement respecté par tous et par toutes. C’était vraiment digne des grandes émissions de télévision. Les discussions étaient d’un niveau très élevé mais sans arrogance ni préciosité. Nous avons même assisté à un moment à un échange vif mais civilisé entre un des débatteurs du panel, je crois, anthropologue, et le Dr Taleb Rifai, l’ex DG de l’OMT, l’Organisation Mondiale du Tourisme.

Un ancien hôpital qui a été transformé en lieu de fêtes et de spectacles, et où se déroulent des concerts presque tous les jours

Avant de finir sur ce volet je voudrais dire un petit mot sur la décoration de la scène. En guise de plateau, les organisateurs ont choisi de reproduire à l’identique un des balcons -très beau et très caractéristique en bois coloré- qu’on trouve un peu partout dans les immeubles Maltais. C’était là où les personnalités étaient invitées à prendre la parole, et toutes se sont prêtées à ce jeu avec plaisir et avec le sourire.

J’en arrive maintenant à la soirée de clôture et de gala qui a eu lieu dans un vieil espace plein d’histoire, mais dont la beauté et le confort feraient rougir d’envie et de jalousie les plus grands théâtres du monde. En fait, c’est un ancien hôpital qui a été transformé en lieu de fêtes et de spectacles, et où se déroulent des concerts presque tous les jours.

J’ai vérifié cela sur place grâce aux nombreuses affiches placardées à l’intérieur. Ce soir-là, nous avons assisté à un concert donné par l’Orchestre Philharmonique de Malte renforcé par plusieurs groupes de plusieurs styles de musique. Pas moins de 15 morceaux et non des moindres ont été joués. Ça allait de Puccini et Verdi jusqu’à Edith Piaf et bien d’autres.

De grands moments de bonheur, mais aussi d’émotions

Le moment le plus émouvant pour nous, les deux seuls marocains venus du Maroc, c’est lorsque, au milieu du programme, Andrew Muscat, le maître de cérémonie, a appelé Najib Senhadji à monter sur scène pour recevoir un trophée à la mémoire de Mustafa Trai, le défunt et regretté ex-président de Fijet Maroc. Le trophée a été remis à Najib, sous les applaudissements de tout le public présent, par la Présidente de Malte en personne qui était, visiblement elle aussi, très émue.

Après cet intermède triste mais solennel, le programme musical a repris de plus belle et a fini par une chanson chantée en choeur par tout le public.

Ce tout petit État de seulement 430 000 habitants, a réussi à attirer l’année passée plus de 2 millions de touristes, soit 5 fois sa population.

Le 3ème jour, les responsables du Forum ont eu la gentillesse d’organiser spécialement pour les membres de Fijet Monde une excursion inoubliable dans plusieurs lieux historiques et célèbres de Malte. Grâce à cette sortie, nous avons fait la connaissance de plusieurs lieux historiques qui font partie du patrimoine très riche et très diversifié de Malte, tels que le Palais Grand Master avec ses beaux tableaux de maîtres et ses magnifiques tapisseries ou bien la célèbre Cathédrale St Johns avec ses murs recouverts d’or pur 24 carats.

Mais nous avons découvert également combien ce pays est ouvert sur l’art moderne dont nous avons pu admirer un échantillon étonnant dans la rue même où se trouve la cathédrale : des dizaines de mini frigos de la marque Red Bull peints en direct et exposés dans la rue.

L’authenticité et la modernité ont un pays, et ce n’est forcément celui auquel vous pensez.

En conclusion, ce que j’ai retenu de ce trop court voyage, c’est que ce petit pays qui ressemble à un jeu de cartes postales, n’en est pas moins un grand pays ambitieux et performant.

Un de ses points forts, c’est sa diversité culturelle et sa richesse sociale.

Plusieurs peuples ont vécu dans ces Îles, à travers les siècles.

Ils se sont parfois disputés, se sont souvent réconciliés, et ils ont toujours fini par se mélanger.

Et le résultat de ce mixage est juste fabuleux : un peuple divers mais uni par le désir ardent d’être chaque jour plus beau et la volonté inébranlable d’aller toujours plus haut.

C’est un peuple fier et ouvert, ambitieux et attachant, performant et modeste, travailleur et jouisseur.

Quand vous êtes à Malte,vous êtes à la fois à Rome, à Londres, à Bordeaux, à Madrid, à Vienne, à Tunis ou à Tanger. Il y a même un grand quartier qui porte le nom de… Rabat et un autre qui s’appelle, à juste titre « Mdina », exactement comme nos vieilles villes antiques.

Maintenant, pour finir, j’aimerais vous donner quelques chiffres pour vous faire réfléchir. Malte est un tout petit Etat dont les 3 îles qui la composent ne dépassent pas en totalité une superficie de 316 km2. Et bien, ce tout petit État de seulement 430 000 habitants, a réussi à attirer l’année passée plus de 2 millions de touristes, soit 5 fois sa population.

Si, pour nous amuser un peu, on appliquait ce rapport à notre pays, le Maroc devrait normalement drainer… 180 millions de touristes !
Enfin, et alors que le taux de croissance du tourisme dans le monde est de 3,6 % et en Europe de 3,9 %, il atteint 24 % à Malte !

Que nos responsables, ceux qui étaient absents de ce forum mais aussi les autres, en prennent de la graine.

Quant à moi, je projette déjà de retourner de nouveau à Malte, mais cette fois-ci pour faire du tourisme, pas pour en parler.

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Mohamed Laaroussi est un spécialiste en marketing et stratégie de communication. Publicitaire, chroniqueur, essayiste, écrivain et scénariste, il dispose à son actif de deux essais philosophiques et un roman. Mathématicien à la base, il a longtemps travaillé dans les secteurs du tourisme et des médias. Ancien de Klem et d’Avenir Conseil, Mohamed Laaroussi a également été directeur commercial adjoint de Radio Méditerranée Internationale.

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