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Impasse algérienne : pour Ahmed Charaï la seule sortie de crise est le décloisonnement politique et l’implication des jeunes

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L’Algérie a connu aujourd’hui, vendredi 8 mars, une des plus grandes manifestations populaires contre le cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika. Des marées humaines ont sillonné les rues des principales villes du pays, et ce, malgré les mises en garde sur les risques de « chaos » lancées par pouvoir en place qui semble déterminé à ne pas céder. Cette importante mobilisation des algériens qui coïncide avec la célébration de la Journée internationale des droits des femmes, a mis le pays au centre de l’intérêt des décideurs, observateurs et analystes du monde entier, qui s’activent à évaluer l’étendue de la crise.

Durant ces manifestations, les algériens ont fait preuve de beaucoup de civisme et de sens patriotique, mais également de détermination à barrer la route à Bouteflika. Ils semblent être libérés du fardeau psychologique de la guerre civile qui a profondément meurtri le pays. Mais devant l’entêtement du pouvoir en place, les inquiétudes de l’embrasement du pays grandissent. Une crise qui a interpellé l’éditorialiste Ahmed Charai, qui a publié ce vendredi, une tribune où il livre sa vision et son analyse à la crise algérienne, qu’il a qualifié d’événement non anodin en mesurant bien ses propos. Pour Ahmed Charai, l’Algérie n’a pas su évoluer avec ses jeunes et le monde qui l’entoure. Et pour sortir de l’impasse, Il lance un appel aux responsables algériens, le temps est à l’évolution, en décloisonnant rapidement le système politique du pays et en impliquant massivement les jeunes dont le plus grand nombre n’a pas connu les affres de la guerre civile.

Vous trouverez ci-après l’intégralité de l’analyse. Bonne lecture.

Algérie, L’heure de l’évolution

Ce qui se passe en Algérie n’est pas anodin. Le refus de la candidature du Président Bouteflika pour un cinquième mandat, alors même qu’il est très diminué physiquement, mobilise la jeunesse et, au-delà, des pans entiers de la société.

Ce n’est pas le bilan de Bouteflika qui est remis en cause. Personnage clé du système depuis 1962 et l’indépendance de l’Algérie, il a entamé la période de sa présidence par un processus de concorde nationale qui a permis de pacifier le pays, après une décennie d’horreurs et de terribles souffrances. Profitant de la hausse des revenus gaziers, il a aussi lancé des programmes sociaux, en particulier au niveau des logements. Cela a permis de réconcilier les populations avec le système FLN, malgré des défaillances sur le terrain des libertés, ou dans la transparence de la gestion publique.

Ce n’est pas le bilan de Bouteflika qui est remis en cause

Mais le monde a changé et le pays a changé. En Algérie 45% de la population ont moins de 25 ans. Ils n’ont aucun traumatisme lié à la décennie de la guerre civile. Par contre, ils ont soif d’ouverture, de démocratie, mais aussi d’opportunités que la rente pétrolière ne permet plus d’offrir, en tout cas pas suffisamment.

Malgré la promesse du Président Bouteflika d’écourter son mandat, d’organiser des élections anticipées au bout d’un an, les manifestations continuent. L’Algérie parait dans une impasse. Pourtant, les élites algériennes ont produit des hommes de valeur et on ne peut imaginer qu’il n’y ait aucune alternative à un président, méritant, mais usé physiquement et politiquement.

En Algérie 45% de la population ont moins de 25 ans. Ils n’ont aucun traumatisme lié à la décennie de la guerre civile

L’Algérie est un espace géo-politique hyper-important. C’est un pays grand comme cinq fois la France, avec à la fois l’une des plus grandes façades méditerranéennes et un Sahara très étendu.

Il est frontalier avec cinq pays et il est en contact direct avec la zone sahélienne, si chargée de risques terroristes et route obligée de tous les trafics. Personne n’a intérêt à une déstabilisation de l’Algérie. C’est ce qui explique la tiédeur de toutes les chancelleries, fort peu loquaces contrairement à ce qui s’est passé en 2011.

L’Algérie est un espace géo-politique hyper-important. C’est un pays grand comme cinq fois la France

Il ne s’agit pas ici de faire des prévisions pour l’Algérie. C’est une question interne et c’est au peuple et aux institutions algériennes de le faire. Mais il est clair, qu’une ouverture politique est nécessaire, dans le sens d’une plus grande implication de la jeunesse. C’est une évolution normale qui s’inscrit dans l’aire du temps.

Personne n’a intérêt à une déstabilisation de l’Algérie. C’est ce qui explique la tiédeur de toutes les chancelleries, fort peu loquaces contrairement à ce qui s’est passé en 2011.

Il n’y a pas un seul marocain sensé qui souhaite la déstabilisation de l’Algérie, malgré les difficultés entre les deux pays. De la stabilité de chacun des deux pays dépend la stabilité de l’ensemble de la région. On ne peut donc que souhaiter à nos voisins une évolution pacifique et positive, pour un avenir meilleur.

Ahmed Charai


M. Ahmed Charai est éditorialiste et éditeur de presse, Administrateur de Plusieurs Think tank à Washington – Membre du Conseil d’Administration du “Center for Strategic and International Studies” à Washington, – – Membre du Directoire de l’ONG “Search for Common Ground” à Washington, – Membre du Conseil du Directoire de ” The Atlantic Council of United States” à Washington – Membre du Conseil Editorial Consultatif de “The National Interest’s Magazine” à Washington. – Membre du Conseil d’Administration du “The Foreign Policy Research Institute” à Philadelphia– Membre du Conseil d’Administration du International Crisis Group. Mr Charai est aussi membre du conseil Consultatif de Gatestone Institute à New York. Mr Charai, s’exprime souvent dans de grands journaux et médias américains dont le Wall Street Journal, New York Times, Le Monde, Fox News, National Interest Magazine, Huffington Post.

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