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Mohcine Jazouli plaide pour une rupture créative de la politique économique du Maroc en Afrique

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La onzième édition du Forum international MEDays a été marquée cette année par la présence active du ministre délégué chargé de la Coopération Africaine, Mohcine Jazouli. Participant à la cérémonie de lancement officiel de l’événement mais également à l’accueil du président burkinabé Roch Marc Christian Kaboré, invité d’honneur des MEDays2018, Mohcine Jazouli a choisi les MEDays pour distiller, dans son discours d’ouverture, et dans un style policé, sa vision disruptive de la politique économique du royaume en Afrique. Immigration, digitalisation, financements, autant de sujets sources d’inquiétudes pour les gouvernements africains dans lesquels l’ancien consultant en stratégie voit des gisements extraordinaires de développement, plaidant pour une rupture créative avec le référentiel du monde passé.

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La politique africaine du royaume a été tout d’abord initiée par l’engagement personnel du roi Mohammed VI. Lequel engagement a créé une dynamique économique et diplomatique qui a retenti dans les quatres coins de la planète et a surtout secoué les acteurs économiques marocains, historiquement tournés vers le nord. En quelques mois, l’Afrique s’est invitée à tous les plans de développements des entreprises marocaines, à tous les programmes d’expatriation et politiques RH et à tous les montages financiers. Et pour cause, le souverain a totalisé un record : plus de 50 visites dans plus de 30 pays africains avec la signature de plus de 1000 accords et conventions. Sans oublier une immersion culturelle et cultuelle entraînant des milliers d’autres rencontres d’affaires et d’événements ainsi qu’une rupture culturelle des décideurs marocains envers l’Afrique noire.

Après l’euphorie de cette dynamique et le retour triomphant du royaume à l’Union Africaine, les premières résistances internes et externes ont commencé à pointer, semant quelques doutes sur le succès de cette stratégie. Alors, qu’au même moment, le monde entier plébiscitait le potentiel africain, les grandes puissances se livraient à une guerre économique féroce sur le continent et le Maroc était d’ores et déjà, le deuxième investisseur africain sur le continent, avec plus de 60% de ses Investissements Directs Étrangers orientés vers l’Afrique et une présence des entreprises nationales dans 40 des 54 pays du continent.

En fait, l’année 2018 a constitué un sas pour toutes les parties prenantes de la stratégie africaine du royaume. L’occasion d’évaluer les actions entreprises jusqu’alors et de se préparer à une nouvelle phase de consolidation, laquelle a été marquée par la création d’un département ministériel en charge de l’Afrique, à la tête duquel a été désigné un consultant ayant exercé durant plusieurs années sur le continent. Ce nouveau département a eu comme première mission le suivi et l’évaluation de l’avancement des projets et conventions signées par le Maroc avec ses partenaires sur le continent. Aujourd’hui, et 9 mois après sa nomination, Mohcine Jazouli semble avoir développé une “doctrine” sur la politique économique du Maroc envers son continent d’appartenance, dont les grandes lignes ont été distillées dans son discours d’ouverture de la onzième édition des MEDays.

LE NIVEAU DE CROISSANCE ACTUEL DU CONTINENT NE PERMET PAS UNE CRÉATION DE RICHESSE SUFFISANTE

Mohcine Jazouli se veut factuel et rappelle les réalités du continent : “Aujourd’hui, le PIB des 54 pays du continent africain totalise 2200 Mds de dollars US pour une population de 1,2 Mds, soit un PIB/hab moyen de 1800 dollars US. La moyenne des pays émergents étant de 9000 dollars US.” Pour le ministre, rejoindre le niveau des pays émergents en 2050 : “conviendrait alors d’atteindre un PIB africain de plus de 20.000 Mds de dollars US (10 fois le PIB actuel). Il faudrait donc un taux de croissance annuel moyen de 7%, la croissance actuelle continentale étant de 2,4%.”

Ces chiffres démontrent le long chemin qui reste au continent à parcourir pour offrir une qualité de vie meilleure à l’ensemble des africains. Des chiffres qui ne peuvent être atteignables, selon le ministre que par “une approche disruptive, une rupture créative” .

L’AFRIQUE ÉVOLUE DÉSORMAIS DANS UN ENVIRONNEMENT DIFFÉRENT

Pour Mohcine Jazouli, l’Afrique doit prendre en compte les évolutions que connaît le monde, aussi bien sur le plan géopolitique, économique, environnemental, social que consumériste. Le ministre en charge des Affaires Africaines démontre ainsi que nous assistons à l’avènement d’un monde différent, et que pour y faire face il y a deux manières de les appréhender : “soit comme une menace que l’on essaye d’éviter sans succès, à coup de recettes issues de l’ancien monde; ou alors comme une opportunité dans un monde nouveau qui rebat les cartes et donne enfin une chance à notre continent.” Pour le ministre délégué, il n’y a aucun doute que l’Afrique retiendra cette deuxième option : “Changer de paradigme est une nécessité, car notre monde ne se contente pas d’évoluer, il se transforme et donne naissance à un monde meilleur. Et nous ne pouvons pas l’appréhender avec le référentiel du monde passé” martèle Mohcine Jazouli après avoir développé les défis dont fait face l’Afrique :

  • Géopolitique : ” Le monde actuel n’est ni bipolaire, ni multipolaire, Nous vivons dans un monde où les rivalités ne portent plus sur des enjeux idéologiques, mais sur des enjeux locaux.
  • Economie: ” Nos économies sont interdépendantes et vulnérables, et les stratégies de développement ne se fondent plus sur des industries manufacturières, mais sur de l’immatériel et de la technologie.
  • Environnement : ” Nous n’avons pas encore trouvé de solution face à une planète qui souffre.
  • Social : ” Nos sociétés souffrent et de fortes disparités se creusent, et nos populations en quête de sens, rejettent les normes établies
  • Consommation : ” Le tout digital et l’avènement de l’intelligence artificielle bouleversent les modes de production et de consommation.

CHANGEMENT DE PARADIGME, STRATÉGIE DISRUPTIVE, RUPTURE CRÉATIVE TELLES SONT LES RECETTES DE MOHCINE JAZOULI

Pour le numéro 2 de la diplomatie marocaine, “en changeant de paradigme, nous pouvons repenser les problèmes de l’Afrique, d’une manière disruptive, porteuse d’innovation et créatrice de valeurs.” Ce changement de paradigme n’est que l’expression des appels du roi Mohammed VI dans ses différents discours appelant l’Afrique à faire confiance à l’Afrique, à libérer les potentiels, intellectuels et physiques, de ses forces vives et à se libérer de ses pesanteurs.

” C’est la volonté de Sa Majesté Le Roi Mohammed VI, qui ambitionne de participer activement à l’émergence d’une Afrique nouvelle. Une Afrique qui recèle un potentiel énorme. Une Afrique qui prend son destin en main.” a clamé le ministre devant les invités d’honneur des MEDays.

Afin d’expliquer ce changement de paradigme, Mohcine Jazouli a livré trois visions principales sur des sujets auxquels les gouvernements africains font face, à savoir, l’immigration, la technologie, et le déficit commercial :

1 – L’avènement du «Tout Technologique» n’est pas une menace, mais une formidable opportunité pour le continent

Pour le ministre marocain en charge des Affaires Africaines, si l’Afrique a raté le train de l’industrialisation, elle pourra rattraper celui de la digitalisation en gagnant le défis infrastructurels et en valorisant notre énorme atout : la jeunesse.

En transformant le plus grand atout démographique du continent en dividende économique, il est possible d’envisager la transformation économique de l’Afrique” tient-il à préciser.

Par ailleurs, Mohcine Jazouli souhaite profiter des maillons de chaînes de valeur que propose la robotisation et sur lesquels l’Afrique peut désormais se baser. Avec comme argument que l’Afrique ne traîne pas avec elle des industries vieillissantes à l’instar de pays fortement industrialisés.

2 – La migration, une aubaine pour le continent si elle est bien encadrée

Se basant sur l’Agenda Africain pour la Migration, présenté par le roi Mohammed VI en janvier dernier, qui démontre les potentialités de la migration en tant que levier de codéveloppement, suivi par la création et la mise en place, à Rabat, d’un Observatoire Africain de la Migration, Mohcine Jazouli présente “ce phénomène intemporel et permanent [considéré comme] un danger, source de préoccupations sur la scène internationale, comme une aubaine pour le continent, contribuant à une transformation profonde des économies si elle est bien encadrée”

3 – L’offre exportable africaine se fera d’abord avec le commerce intra-africain que le commerce international

La doctrine Jazouli prône la promotion et le renforcement du commerce intra-africain tant au niveau régional que continental par des intégrations régionales axées sur l’économique.

Pour le ministre marocain de la Coopération Africaine, ” la mise en place d’une Zone de Libre Échange Continentale Africaine, la Zlecaf, apparaît comme une condition sine qua non pour permettre à l’Afrique d’émerger.” Jazouli argumente cette affirmation par les pronostics de l’Union Africaine affirmant que la Zlecaf augmentera le commerce intra-africain d’au moins 60% et diversifiera l’offre exportable africaine.
” Sachant que Pour l’instant, sur les 54 pays que compte l’Afrique, la quasi totalité a déjà signé l’Accord visant à supprimer les barrières douanières.” rappelle le ministre.

LA DOCTRINE JAZOULI A-T-ELLE LES MOYENS DE SON AMBITION ?

L’écosystème diplomatique et économique marocain évolue dans un environnement national et régional perturbés. La mise en oeuvre de la doctrine Jazouli, nécessite des conditions, des préalables et des moyens qui ne sont pas nécessairement disponibles ou difficilement réunis :

  1. Une cohérence gouvernementale entre les différents départements ministériels, aussi bien entre les directions du ministère de Nasser Bourita qu’avec les ministères de Moulay Hafid Elalamy et de Benchaâboun;
  2. Une architecture financière solide permettant d’accompagner, d’une part, les acteurs économiques dans leur conquête du continent et de doter, d’autre part, les représentations diplomatiques de ressources humaines et financières adéquates;
  3. Une mobilisation générale, redonnant confiance et le désir d’entreprendre aux parties prenantes de cette dynamique africaine;
  4. Une constance dans l’action politique et diplomatique traitant les dossiers brûlants de notre intégration africaine et de notre cause nationale.

Intelligence analyst. Reputation and influence Strategist
20 années d’expérience professionnelle au Maroc / Spécialisé dans l’accompagnement des organisations dans la mise en place de stratégies de communication d’influence.

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